Si Claire a choisi de faire des études de restauration d’œuvres d’art, ce n’est pas sans raison, et il faut aller chercher dans sa plus tendre enfance pour comprendre à quel point la dimension artistique est centrale dans son existence. Elle découvre peu à peu que l’art rapproche de Dieu si l’on sait l’y trouver, et elle y trouve une profonde nourriture spirituelle, notamment dans les derniers mois de son existence en restaurant la basilique d’Assise.
« Si je ne peux pas écrire, je ne peux pas non plus jouer du piano, et c’est épouvantable ! affreux ! Alors, aurais-tu la très grande bonté d’enregistrer sur une cassette, un Bach ? Tu me ferais tellement de plaisir ! »
(le 3 avril 1970, à 16 ans, à sa sœur. Claire est tombée sur la main.)
« J’ai bien besoin de vos prières et des prières de tout le monde (…) Je m’explique : plus je connais les gens, plus ça me déprime ; je pensais que l’Art pour l’Art (même si on est rétribué) et le Beau pour le Beau, donc le sens de la gratuité des choses, donnaient aux gens une profondeur et quelque chose en plus que n’ont pas les petits mecs qui ne savent que faire et ne s’intéressent à rien. Evidemment, à part deux ou trois snobs, tous sont intéressés par ce qu’ils font, et même passionnés : mais après, plouf ! la seule chose qui les intéresse, c’est le plaisir sous toutes ses formes. Alors, ça me déprime et ça m’écœure un peu. Je ne peux pas les juger, mais tous ceux avec qui je parle, à part deux, sont ainsi. »
(le 30 janvier 1973, à 19 ans, à ses parents, au début de ses études à Rome)
« Vingt minutes, mes petits parents, avant que mon solvant ne fasse son effet. (…) … J’enlève mon solvant. encore cinq minutes. Mon Christ est fabuleux. »
(le 7 février 1973, à 19 ans)
« J’ai fini ma sainte Famille et je nettoie une Madone en bois doré qui doit être prête dans trois semaines pour l’exposition du Palais de Venise, alors on nous fait revenir l’après-midi pour 5000 lires. Vachement intéressant ! Et l’argent, ce n’est pas mal, mais la Sainte Vierge est si belle que je me fiche des 60000 lires au bout de nos douze après-midi. »
(le 11 février 1974, à 20 ans)
« Hier, j’ai travaillé deux bonnes heures studieuses sur 40cm² de décoration d’or, au bas de la chasuble de saint Martin. Ce morceau, assez abîmé mais pouvant être reconstitué, est d’une beauté qui m’enchante, et je n’ai pas besoin de vous dire le cœur que j’ai mis à la faire. »
(le 11 novembre 1974, à 21 ans, pendant la restauration des fresques de la Basilique d’Assise)
« C’est fantastique, nos journées devant ces fresques merveilleuses, très, très belles d’ailleurs, les plus belles des deux basiliques, et surtout pleines de vie spirituelle qui ne peut pas ne pas nous toucher. Incroyable, combien, après six siècles et demi, ce type peut faire passer son âme en nous, pendant qu’on le restaure. »
(le 21 novembre 1974, à 21 ans, pendant la restauration des fresques de la Basilique d’Assise)